Comment
parler d’une personne en son absence, sans la trahir ? Et
tout particulièrement quand il s’agit de Christian Bobin.
Lorsque
j’ouvre un livre de Christian Bobin, j’y vois du concentré d’âme, de la poésie
pure, des diamants qui me touchent au cœur. Alors je savoure lentement, à dose
infime, homéopathique.
De cet homme, Eric Garault (dans un interview pour Lire) ne dit-il pas qu’il « a choisi la solitude, vit loin de Paris, de l'agitation, des mondanités, des injonctions du monde moderne, dans un petit village près du Creusot, en Bourgogne. Il publie des livres comme on jette des bouteilles à la mer et leur donne des titres parfaits: L Éloignement du monde, Éloge de rien, Éclat du solitaire, L'enchantement simple ou encore Une petite robe de fête.»
S'il
écrit peu de poèmes, formellement parlant, Christian Bobin est sans doute l'un
des écrivains contemporains qui sait au plus juste mettre en œuvre l'injonction
d'habiter poétiquement le monde, injonction proférée jadis par Hölderlin. Avec
lui, pas de faux-semblants, aucun réflexe de littérateur, mais un engagement de
l'être dans le temps même de la vie, et une parole qui a pouvoir de viatique.
Les textes rassemblés dans ce volume ont tous ce supplément d'âme et de lumière
qui, non seulement fait escorte, mais invente des routes imprévues, des
clairières inespérées, sans jamais occulter les épreuves, les alarmes ni les
deuils. « Je suis né dans un monde qui commençait à ne plus vouloir entendre
parler de la mort et qui est aujourd'hui parvenu à ses fins, sans comprendre
qu'il s'est du coup condamné à ne plus entendre parler de la grâce », écrit
Christian Bobin dans La Présence pure. Et cette grâce qu'il préserve au bord de
la mort comme sur le visage de l'amour, il s'en fait le guetteur, le sourcier,
et il a comme personne les mots pour l'éveiller.
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